Tromborn pendant la guerre de 1939-45

Août 1940 à Brigueil-le-Chantre, lieu de refuge des Trombornois et des Villingeois. Comme tous les réfugiés, ils vivaient dans l’attente de leur retour au Pays. L’ensemble des réfugiés s’apprêtait à être acheminé par camions jusqu’à la gare de « La Trimouille » d’où l’embarquement par voie ferroviaire devait se faire début septembre. Arrivés à la gare de ce chef-lieu de canton, alors que leurs maigres biens emportés lors de l’exode ou acquis durant leur séjour étaient casés dans plusieurs wagons, et que tout le monde était prêt pour le départ, un fâcheux contre-ordre était annoncé. Il n’était plus question de partir pour le moment, l’annonce de la destruction du village n’autorisant pas le retour des habitants dans leur commune d’origine. C’est ainsi que les réfugiés furent à nouveau répartis dans des lieux et pièces de fortune jusqu’à ce qu’une solution fût trouvée. Pendant quatre semaines, tous durent manger, à nouveau, à la soupe populaire préparée par des bénévoles. Tout leur maigre bien restait bloqué dans les wagons à la gare de « La Trimouille ». C’est finalement le 30 septembre, après de longues tergiversations, que l’autorisation tant attendue parvint aux autorités locales. Ainsi, près de quatre semaines après les autres villages alentour, le 3 octobre 1940, ils arrivent en gare de Metz, où ils furent d’abord relogés, dans une grande promiscuité, à l’école Paixhans.Mais ce n’était là que le début d’une période de migration qui les conduisit tout d’abord à Gondreville et Vry. De là, après quelques jours, ils furent transférés à Boulay, dans les maisons des sous-officiers de la caserne Grossetti. Comme il n’était pas question, pour les Allemands de loger des civils dans des casernes, une nouvelle fois, ils furent obligés de déménager pour être relogés, pour la plupart, à Varize, à Condé-Northen et son annexe Pontigny. Ceci dans les habitations de la population lorraine expulsée. Ils y restèrent tout le temps de l’occupation allemande. Ce n’est qu’après guerre, que deux familles logées aux Etangs pendant l’occupation ont loué des pièces à Odenhoven, notamment au café Altmayer. En résumé, les habitants étaient dispersés dans une vingtaine de localités. Au retour des expulsés de Varize en 1945, ils furent à nouveau dans l’obligation de déménager ou de restreindre leur espace vital, n’ayant pas encore de quoi se reloger à Tromborn. 

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Tromborn en 1940

A partir de 1946, la plupart revinrent habiter dans des baraquements provisoires, dans l’attente que leurs immeubles soient reconstruits. Les premiers sinistrés à revenir à Tromborn, à partir du mois de mars 45, étaient les légitimes propriétaires des deux maisons restées debout (Brembor et Noël Jos.), suivis par trois autres familles relogées avec bienveillance dans l’immeuble Brembor. Quatres familles s’installèrent au « Erbhof » (actuellement ferme Contelly), huit autres dans les maisons construites par les Allemands et non achevées et ce à deux familles par immeuble. Ni portes ni plancher, ces familles se sont arrangées pour les rendre à peu près habitables, en attendant des jours meilleurs. Evacuation non comprise, c’est donc à six déménagements successifs qu’ils ont été contraints de se soumettreAinsi en 1946, lors du premier recensement d’après guerre, cent dix sept personnes étaient recensées contre trois cent soixante quatre lors du recensement de 1936. Près d’une semaine après le retour d’exode, alors que les réfugiés logeaient encore à Metz, les autorités allemandes autorisèrent une personne par foyer, généralement le chef de famille, à se rendre dans leur commune d’origine. Les consignes s’étant assouplies au fil des jours, j’ai pu m’y rendre également. En arrivant à l’entrée du village martyr, un aspect de grande désolation s’est offert à mes yeux, car à cause de son site en hauteur et de la présence de nombreux obstacles défensifs, le village, composé de quelque quatre vingt dix immeubles fut entièrement détruits. Pratiquement aucune maison n’avait été épargnée ; au centre de l’agglomération toute une rangée d’immeubles avait été détruite par le feu. Ailleurs, toutes les maisons portaient des traces d’autres dégâts tels qu’éventra-tion de façades, trous d’obus, toitures effondrées du fait des déflagrations d’obus, toutes ces destructions attestaient de l’ampleur du bombardement. Dans la maison paternelle, située presqu’en face de l’église, était fichée à la verticale, une grosse poutre de charpente de l’église qui avait transpercé la toiture et deux plafonds. Partout des portes baillaient, plus aucune vitre aux fenêtres, des volets pendaient sur quelques façades encore debout.Dans ces mêmes immeubles tout était sens dessus-dessous. Les meubles avaient été déplacés de maison en maison, soit encore regroupés dans certains cas. Les armoires étaient vides de tout leur contenu, parfois des planchers avaient été arrachés et avaient été brûlés, peu de portes avaient résisté aux tirs d’artillerie. Les fils téléphoniques et électriques pendaient jusque par terre. Ailleurs, les mauvaises herbes envahissaient les seuils des maisons. Même dans le mur d’enceinte du cimetière, des brèches avaient été percées, c’est dire que même le repos des morts n’avait pas été respecté. Dans d’autres immeubles presque plus de mobilier, au mieux des armoires sans portes ; partout des immondices. Dans les vergers alentour où avaient été creusés des abris et tranchées, on retrouvait parfois des fragments de meubles, des matelas pourris, des portes, des volets, ou encore des fourneaux. Le soir, avec le coeur gros de tout ce que j’avais vu, je suis retourné à Metz. Cette vision restera toujours gravée dans ma mémoire.

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